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INTERVIEW – Camille Cottin : “Souvent, je me sens à nouveau débutante”

Carlos Gomez | à 06h47

INTERVIEW – Camille Cottin : “Souvent, je me sens à nouveau débutante”

Nourrie au cinéma par ses parents avant de s’imaginer devenir actrice, l’ambassadrice Dior Mode et Beauté sera la maîtresse de cérémonie du festival de Cannes. Rencontre privilégiée à l’Hôtel Barrière Fouquet’s Paris.

Accrocher la lumière. La laisser vous caresser. Jouer avec. Camille Cottin sait faire. Avec la complicité éclairée de notre photographe Marcel Hartmann, l’instantané est sublime. Appréciez-le ce regard. « Vert et je te veux vert », comme dans le poème de García Lorca. Rasséréné. Un regard qui dit la vérité. Celle d’une femme de 45 ans, épanouie, qui rayonne dans l’exercice d’un métier qu’elle mène depuis longtemps déjà et qui la conduira dans quelques jours à déclarer ouvert celui qu’on appelle « le plus grand Festival du monde ». Cannes. Un nouveau rôle pour elle. Celui de maîtresse de cérémonie, auquel s’étaient frottées avant elle quelques-unes de nos plus grandes actrices. Jeanne Moreau – par trois fois –, Isabelle Huppert, Kristin Scott Thomas et puis Monica Bellucci. Ou plus récemment, Doria Tillier, Virginie Efira, Chiara Mastroianni l’an dernier. Etonnant parcours que le sien. Celui d’une petite fille qui aimait faire rire. Celui d’une adolescente qui se passionne pour le théâtre et s’y rodera dix ans. Celui d’une femme enfin qui, à 30 ans passés, accède à la notoriété quand elle y avait renoncé. Car c’est le succès de Connasse – la série puis le film Connasse, princesse des coeurs –, dont elle n’aime plus trop entendre parler, qui nous vaut d’avoir découvert Camille Cottin. Comédienne complète, être complexe, elle est mère de deux enfants – Léon Gabriel, 14 ans et Anna Paloma, 8 ans –, qu’elle prend le temps de « sensibiliser, dit-elle, à son métier, pour tout ce qui a trait à la fabrication, l’écriture, le jeu… » Tout en veillant à les tenir à distance de sa dimension de représentation. « Le fait que je sois connue, confie Camille, n’est pas anodin pour eux, compte tenu de leur âge. »

GALA : Quelle est votre première expérience du festival de Cannes ?
CAMILLE COTTIN
: J’ai été invitée à ma première montée des marches en mai 2019, pour la présentation de Chambre 212 de Christophe Honoré, avec Chiara Mastroianni, Benjamin Biolay, Vincent Lacoste… Un super casting. Une belle équipe. Surtout, ce qui était un peu irréel, c’est que nous avions terminé le tournage en janvier ; nous ne pensions donc pas que le film serait prêt à être montré en mai. Je me souviens du coup de fil de Christophe ; il était minuit, je terminais de dîner chez des amis. Il a juste dit : « On va à Cannes ! » Ça résonne encore !

GALA : Deux ans plus tard, vous y retournez pour Stillwater (Universal)…
C. C. :
Un très joli moment. Nous avions travaillé à Marseille, pas très loin de Cannes, et toute l’équipe était très remuée du fait de s’y retrouver, autour de Tom McCarthy, notre réalisateur, et bien sûr de Matt Damon. Avoir partagé leur émotion d’être là me laisse des souvenirs très joyeux.

GALA : Cannes, c’est aussi un protocole qui peut sembler pesant vu de l’extérieur. Est-ce parfois le cas ?
C. C
. : Ça répond à des règles établies, forcément. Mais ce que je trouve touchant, c’est que je n’y ai encore jamais rencontré quelqu’un de blasé ! Même pour ceux qu’on appelle les « habitués ». Il y a une émotion toujours renouvelée d’aller y montrer un film. C’est extrêmement émouvant. Car derrière, il y a énormément de travail, surtout pour les cinéastes. C’est un long parcours que de fabriquer un long-métrage avant de pouvoir le partager et le faire découvrir. Forte de ma toute petite expérience, je constate juste que la magie opère toujours.

GALA : Thierry Frémaux promet un Festival « pacifié, joyeux, généreux ». Que peut le cinéma face à l’état du monde ?
C. C.
: Il faut se rappeler que Cannes fut créé en 1939 pour répondre au fascisme et au Festival de Venise, utilisé comme outil de sa propagande. Ça n’a certes pas empêché la guerre et, pour autant, le 7e art possède toujours des vertus conciliatrices, il est vecteur de réflexion, d’émotion…

GALA : C’est en partie le message que porte l’affiche de cette 77e édition…
C. C.
: Je la trouve particulièrement belle. Elle détourne une image d’un film de Akira Kurosawa [Rhapsodie en août, ndlr] dont l’héroïne est une grand-mère rescapée du bombardement de Nagasaki, en 1945, qui transmet à ses petits-enfants sa foi inébranlable en l’humanité. Ils apparaissent de dos, la nuit, assis sur un banc, et entourent la vieille dame en regardant la lune, comme s’ils levaient la tête vers un écran de cinéma. L’image est porteuse d’harmonie et de douceur. Dans le contexte qui est le nôtre actuellement ce n’est pas négligeable, bien que seulement symbolique.

GALA : On devine que votre texte d’introduction pourrait emprunter cette direction…
C. C.
C’est encore un peu tôt pour vous donner des pistes. C’est en évolution. Disons que rien n’est encore figé. En fait, je préférerais garder secrète la part de magie qui précède pour moi la préparation de ce rendez-vous.

GALA : Vous avez voulu vous repasser ce qu’avaient dit vos prédécesseurs ?
C. C.
: J’ai adoré Edouard Baer et sa poésie, Virginie Efira, Chiara Mastroianni, Audrey Tautou, Doria Tillier…

GALA : Comment envisagez-vous ce rôle ?
C. C.
: Il s’agit d’abord d’accueillir les festivaliers dans la salle, comme les spectateurs devant leur écran, en leur souhaitant la bienvenue ; les prendre en quelque sorte « par la main », les mettre à l’aise et, petit à petit, les conduire dans cet univers hors de leurs repères. Puis, accueillir chaleureusement celles et ceux qui vont faire cette édition. Certains maîtres et maîtresses de cérémonie ont su faire de cet exercice un moment de grâce.

GALA : Dans le fond, ce rôle que le Festival vous demande de tenir ne ressemble à rien que vous ayez interprété avant ?
C. C.
: Exactement ! Souvent, je me sens à nouveau « débutante ». Chaque nouveau rôle me donne l’impression, non pas de partir de zéro, mais d’apprendre.

GALA : Quelle place avait le cinéma dans votre vie quand vous étiez enfant ?
C. C.
: Une place prépondérante ! Mes parents ont fait ce qu’il fallait. Je suis de la génération VHS et, avec ma petite soeur, on avait cinq cassettes qui tournaient tout le temps : Autant en emporte le vent, Les Demoiselles de Rochefort, Les Pétroleuses et Viva Maria ! – avec Brigitte Bardot –, et puis Grease. Que des films dont les femmes étaient des héroïnes, vous noterez ! On sortait aussi pas mal avec mon beau-père et ma mère, qui nous emmenaient voir les films de Billy Wilder en noir et blanc au Grand Action, à Paris.

"Les choses changent aussi parce qu’on les réclame, sinon elles ne changent pas"

GALA : Et quelle place ont les films découverts à Cannes ?
C. C
. : Quand je regarde en particulier la liste des Palmes d’or, il y en a pas mal qui sont le fondement de ma culture cinématographique : Pulp Fiction de Quentin Tarantino, qui vient chercher son trophée en faisant un doigt d’honneur ; et Moi, Daniel Blake de Ken Loach : en sortant de la salle, j’étais pulvérisée… Et puis, il y a Parasite de Bong Joon-ho où, après la dernière image, on reste là, sonné, sans voix. Mais je pourrais citer aussi La Vie d’Adèle et également Anatomie d’une chute, récompensé l’an dernier.

GALA : Et s’il ne fallait en choisir qu’un ?
C. C.
: La Leçon de piano de Jane Campion. J’avais 15-16 ans quand le film est sorti en 1993. Une empreinte indélébile ! Sa musique, ses plans, la puissance de la nature ; et son point de vue féministe à travers ce personnage sublime que joue Holly Hunter. Tout y est vraiment fort. Voilà le genre de film qui a pris une place folle dans mon imaginaire, tout en créant un espace dans lequel a grandi l’idée de faire un jour ce métier.

GALA : Vous avez revu le film ?
C. C.
: Oui. Et il n’a pas du tout vieilli. Il est entré dans l’histoire en offrant la Palme d’or à une femme. Ce n’était jamais arrivé. Elle est tellement inspirante. Quelle vie elle a eue. J’ai vu le documentaire que lui a consacré Julie Bertuccelli [La Femme cinéma, ndlr], où Jane Campion raconte avoir vécu « son plus grand succès et sa plus grande peine » à dix jours d’intervalle, puisque venue à Cannes enceinte, elle avait dû repartir en urgence avant de recevoir son prix, puis perdu son enfant.

GALA : Deux autres réalisatrices ont remporté la Palme d’or. Elles sont de plus en plus nombreuses dans la Sélection officielle, malgré des variations d’une année à l’autre. Vous pensez que le métier va dans la bonne direction ?
C. C.
: C’est manifeste, bien que l’on soit loin de la parité. Mais les choses changent aussi parce qu’on les réclame, sinon elles ne changent pas.

GALA : A un autre niveau, Judith Godrèche a rallumé le débat récemment en réclamant que des mesures soient prises contre les violences sexuelles envers les enfants…
C. C.
: Elle demande qu’on légifère et je suis évidemment d’accord avec elle. Ce sont les répétitions aussi qu’il faudrait encadrer avec des référents ou des coachs, peu importe comment on les appelle.

Cet article était à retrouver dans le Gala N°1613, disponible le 9 mai dernier dans les kiosques. Pour suivre l'actualité en direct, vous pouvez rejoindre le fil WhatsApp de Gala. Le nouveau numéro de Gala est sorti ce jeudi 16 mai 2024. Bonne lecture.

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Crédits photos : MARCEL HARTMANN

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